Ni beaux ni laids

Quelques mois plus tard, le jardin commence à produire des légumes, des fleurs et la femme commence à mettre au monde de drôles de petits bébés tout plissés.

L’aîné vient au monde un 24 décembre. On le nomme Séraphin. Petit nez pincé, cheveux noirs et frisés, grands yeux curieux, Séraphin se révèle un enfant particulier. Pour souligner ce grand événement, l’homme achète un rosier robuste et un pommier pour le printemps prochain.

Fertile, la femme donne naissance rapidement à un autre fils, un jour de grande tempête. L’homme reboise son terrain avec un prunier et il orne le jardin avec de grandes marguerites toutes blanches.

Conrad est un bébé plus difficile. Il pleure souvent et ses cris réveillent Séraphin. Inquiets, les nouveaux parents font venir le médecin du village.

- Ce n’est qu’un enfant comme les autres et chacun possède son propre caractère leur dit-il.

Rassurée, la femme organise la chambre des petits munie de plusieurs lits et d’une grande fenêtre qui s’ouvre vers le jardin. Dans un coin de la pièce, tous les jouets destinés aux enfants sont fabriqués par les parents. Des étagères servent de bibliothèque pour les futurs étudiants de la petite école.

Puis vient Napoléon. À deux mains, l’homme plante un poirier, disperse, tout au long de la rivière, de la mauve musquée. Ainsi, se dit-il, les beautés de ce monde s’en iront au gré du vent.

Devenu bon jardinier, l’homme fertilise la terre, pince les tiges des rosiers, élimine les mauvaises herbes, taille le lierre envahissant et il attache adroitement certains arbres à des tuteurs.