Ni beaux ni laids

Une dame,  assise dans un salon, contemple une image dans un miroir. Il s’agit d’une petite fille aux grands

yeux noirs.

- Que fais-tu petite?

- Je regarde, dit l’enfant.

- Que fixes-tu si tristement?

La petite fille esquisse un sourire de lune.

-         Je vous regarde, vous, les grandes personnes. Parfois, vous êtes gentilles ; parfois, vous volez tous

nos rêves. Sans le savoir ou sans le vouloir, je ne sais pas. Le petit Prince a dit : «  Les enfants doivent être

indulgents envers les grandes personnes », mais le petit Prince a oublié de vous dire de ne jamais nous

dépouiller de nos rêves.

La vieille femme scrute cet enfant si sage, trop sage. Où sont passés ses joujoux, la magie de Noël, la

pensée magique de devenir une princesse?

-         Tu les as peut-être perdus?

-         Non, Madame. Je n’ai rien perdu du tout. Vous n’avez rien compris.

Pensive, la dame se rappelle aussi que le petit Prince a dit : » Les enfants seuls savent ce qu’ils cherchent. »

-Dis-moi quel est le rêve le plus important pour toi, que les adultes ont réussi à te dérober?

-         Celui de voler dans le ciel.

-         Viens, dessinons une petite fille avec de grandes ailes. Puis, unissons nos souffles et tu pourras

t’envoler.

Une larme de bonheur glisse sur la joue de l’enfant.

La vieille dame se lève et passe sa main dans la glace. Unies par les mains, soudées par le regard, la vieille

dame et l’enfant esquissent un merveilleux papillon aux yeux noirs. Sa tête ressemble à une jolie poupée de

porcelaine peinte de mille feux.

Puis, la vieille dame et l’enfant coupent leur féérique croquis. Émerveillées par leur œuvre et fiancées par le

cœur,  la vieille dame et l’enfant soufflent, soufflent et soufflent.

Depuis ce jour, une silhouette toute menue parcourt le ciel. La main agrippée à une vieille dame, on pourrait

croire à l’ombre de notre propre rêve.

Francine 16-10-09

 FFA No : 00051195